GRASP-SAS a été créée en 2015 par un jeune chercheur post-doctorant du labex CaPPA
17 février 2017 – Le mot du créateur de GRASP-SAS
La création de la start‐up GRASP vise à valoriser les développements scientifiques en télédétection, en particulier ceux du Laboratoire d’Optique Atmosphérique (LOA) et aussi à relever les défis croissants de la communauté scientifique « Earth Observation » (EO). En effet, l’exploitation scientifique des données EO devient de plus en plus difficile. Leur volume et leur complexité augmentent constamment tandis que leur traitement efficace et leurs interprétations pratiques ont besoin d’investissements importants pour permettre l’adaptation des algorithmes scientifiques EO aux nécessités de la société. En particulière, notre principale expertise est la description des propriétés des aérosols et de la surface à partir des observations de télédétection EO.
Les aérosols sont des particules fines en phase solide ou liquide en suspension dans l’atmosphère, et ont une origine naturelle (processus volcaniques, embruns marins, poussières soulevées par le vent, etc..) ou anthropique (combustion du charbon, du pétrole, du bois etc..). Les aérosols ont un impact significatif sur le climat en raison des forçages radiatif qui induisent des réponses climatiques diverses. En effet, les aérosols réfléchissent et absorbent le rayonnement solaire, ce qu’on appelle effet direct, et peuvent modifier les propriétés microphysiques et optiques des nuages, ce qu’on qualifie d’effet indirect. Par conséquent, ils contribuent généralement à un refroidissement ou, dans certains cas, à un réchauffement de la planète suivant plusieurs paramètres: leur distribution spatiale (concentration) dans l’atmosphère, leur taille, leur forme, leur capacité d’absorber le rayonnement, etc. De plus, la pollution atmosphérique due aux fines particules en suspension est un problème environnemental d’intérêt mondial. Le contrôle de la qualité de l’air dans le monde est régi par différentes normes (par exemple en Europe : 2008/50/CE – CAFE- “Clean Air For Europe”). Evidemment, les effets des aérosols sur la santé, la qualité de l’air et le climat affectent les décisions politiques et ont un impact direct sur l’utilisation de l’énergie et les activités économiques à travers le monde. Les diverses agences et organismes publics mondiaux s’engagent de façon importante sur ces thématiques. La détection des aérosols et leur caractérisation sont donc à la fois des objectifs pour les organismes de recherche mais intéressent déjà le monde de l’entreprise vu la forte demande sociétale associée.
La société GRASP base ses travaux de recherche sur un algorithme développé au LOA (Unité mixte de recherche CNRS/Université de Lille) pour extraire des informations sur les aérosols et les propriétés de la surface sous-jacente. La caractéristique intrinsèque du logiciel est sa versatilité: le logiciel a la possibilité d’exploiter de nombreuses mesures de télédétection (images satellites, mesures au niveau du sol, mesures in-situ etc.). Cette première propriété représente déjà une grande nouveauté par rapport aux algorithmes existants, qui sont appliqués uniquement à un seul type de mesure. Par ailleurs, le logiciel GRASP a la capacité de combiner différentes mesures dans une seule inversion. Par conséquent, GRASP peut traiter les informations issues d’une grande variété d’observations de télédétection pour caractériser les propriétés des divers composants atmosphériques et de la surface. En plus, la technique d’inversion utilisée est plus sophistiquée que celle utilisant les traditionnelles tables de valeurs pré-calculées où l’on simule le signal dans différentes conditions et où la sélection du modèle d’aérosols se fait en minimisant les écarts avec les observations. Notre méthode a recours à une optimisation statistique d’inversion d’observations en suivant la méthode multi- terme des moindres carrés (LSM) [Dubovik and King, 2000]. Cette méthode combine plusieurs avantages: l’algorithme peut inverser simultanément différents types d’observations (observations dites passives résultant de la diffusion du rayonnement solaire par le système terre-atmosphère ou des mesures dites actives où la source du rayonnement est une émission lidar) et elle retrouve l’ensemble des paramètres pertinents (les propriétés de l’atmosphère mais également la contribution de la surface par exemple dans le cas d’observations spatiales). De plus, cette approche a permis le développement du concept innovant de multi-pixels. On peut combiner dans l’inversion des informations venant de pixels voisins (notion de variabilité spatiale : l’atmosphère est plus homogène que la surface à l’échelle de quelques kilomètres) ou venant d’observations effectuées à différentes dates (notion de variabilité temporelle: la surface évolue moins à deux jours d’intervalle que l’atmosphère),
Ces caractéristiques très novatrices du logiciel GRASP ont suscité l’intérêt de différentes institutions publiques et privées. En moins de deux années d’existence, nous avons signé plusieurs contrats avec l’ESA et l’EUMETSAT pour un montant total de 600 K€ dans le but d’améliorer le code mais aussi d’appliquer notre algorithme aux données des instruments du programme européen de satellites météorologiques de deuxième génération d’EUMETSAT (EPS-SG). Nos objectifs ne se limitent pas à l’Europe, nous souhaitons appliquer notre logiciel à toutes les mesures satellitaires dédiées aux aérosols à un niveau mondial. Nous avons ainsi déjà établi des contacts avec les agences spatiales chinoise, japonaise et américaine.
L’intérêt des entreprises privées est pour le moment concentré sur l’exploitation des mesures réalisées depuis la surface ou in-situ. Ainsi, nous avons collaboré avec la société Airphotons et l’Université de Maryland (États-Unis) en fournissant un logiciel permettant de traiter les données du Néphélomètre Polar (PI-Neph) (voir Espinosa et al. 2016). Grâce à cette collaboration, les Néphélomètres Polar qui seront commercialisés à partir de 2017 utiliseront notre logiciel GRASP pour traiter leurs données. Nous avons également des contacts avec d’autres sociétés, comme CIMEL-Electronique (société française), Beijing Ge-Rui-Si-Pu Science and Technology Ltd. (société chinoise) ou Sieltec Canarias S.L., (société espagnole), avec lesquelles nous sommes en train de développer des accords de partenariats.
Une des difficultés que la start-up GRASP-SAS aura à affronter à court terme sera de recruter un personnel qualifié dont les compétences permettront de développer et de soutenir les diverses applications du logiciel GRASP. Notre proximité avec le monde académique (Université de Lille 1 et CNRS avec lesquels nous avons un accord d’hébergement au sein du Laboratoire d’Optique Atmosphérique pour les 4 prochaines années) sera là déterminante. Notre domaine d’activités nécessite une formation spécifique en physique de l’atmosphère, formation prodiguée principalement dans différentes universités françaises ou étrangères. Cette proximité permet d’établir des liens privilégiés avec les jeunes docteurs pour lesquels travailler dans une société comme GRASP-SAS représente une excellente opportunité de mettre en valeur le savoir-faire acquis pendant la thèse.
Finalement, nous voudrions indiquer que le logiciel GRASP est un logiciel d’accès libre pour le monde académique. Nous espérons que cette politique d’ouverture contribuera à en assurer la promotion et la diffusion la plus large possible. Signalons néanmoins que seuls GRASP-SAS et le Laboratoire d’Optique Atmosphérique (LOA) ont le droit d’exploitation et l’expertise nécessaire pour répondre aux appels d’offres qui nécessiteraient l’utilisation du logiciel GRASP.
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Dubovik, O. and M. D. King, “A flexible inversion algorithm for retrieval of aerosol optical properties from Sun and sky radiance measurements”, J. Geophys. Res., 105, 20,673–20,696, 2000.
Espinosa, W. R. et al., “ Retrievals of Aerosol Optical and Microphysical Properties from Imaging Polar Nephelometer Scattering Measurements”, Atmospheric Measurement Techniques Discussions, 2016, pp. 1-26, 2016.